Dora fait son cinéma

Les personnages de la comédie dramatique de Dora

 Au départ, tout le monde fait bon ménage, y compris la mère de Dora ( elle, elle le fait pour de bon. Si c’est métaphorique, en tout cas, elle n’en sait rien.

 Page 15 Freud écrit :   » Ainsi que je l’ai déjà mentionné je devais à l’intelligence peu commune de son père de n’avoir pas à rechercher chez ma malade Dora le point de départ, tout au moins pour la dernière forme revêtue par la maladie ( cette formule mérite d’être retenue ). Son père m’apprit que lui et sa famille avaient noué à B…, une amitié intime avec un couple habitant cet endroit… Madame K. l’aurait soigné pendant sa grande maladie et se serait par là acquis un droit éternel à sa gratitude. M. K s’était, paraît-il montré toujours aimable envers sa fille Dora, avait, lorsqu’il était là entrepris des promenades avec elle, lui faisant de petits cadeaux ; personne cependant n’y aurait trouvé de mal (Tiens, tiens et Freud alors ?). Dora se serait occupée avec une grande sollicitude des deux petits enfants du ménage K…, aurait en quelque sorte remplacé leur mère.

 Mettons en scène tous les personnages :

1 – Il y a bien sûr le quatuor : Le père de Dora et Madame K. Et Monsieur K. et Dora.

 2 – Mais existe quand même une triangulation oedipienne classique : Le père, la mère et Dora.

Cette triangulation oedipienne se retrouve explicitée en clair dans le premier rêve de Dora avec cette phrase du père  » Je ne veux pas que mes deux enfants périssent brûlés à cause de ta boite à bijoux  (celle de la mère ) « .

 

Cette triangulation oedipienne, même si elle existe est gravement altérée par le fait que la mère n’est pas une femme aimée. Ce qui rend donc difficile pour Dora son identification maternelle. Elle n’a rien de bien valorisant ni aguichant à proposer comme appui identificatoire.

 

3 – Autre triangulation toujours de type oedipien l’identification au frère, comme objet rival, en tant que fils préféré de la mère.

 

4 – Enfin dernier triangle la gouvernante de Dora, son père dont elle était amoureuse, et Dora elle-même, identifiée à cette gouvernante. A noter que les identifications féminines de Dora, sont celles aux gouvernantes, la sienne, et celle des enfants K.

 

J’ai fait un petit schéma de ces rapports oedipiens qui restent sous jacents :

Avec des personnages annexes qui jouent eux aussi leur rôle.

 

 Je me suis aperçue dans l’après-coup que je n’avais pas inscrit sur ce tableau, parmi les personnages, la tante de Dora, sœur du père. Je me suis donnée comme explication qu’on ne savait pas grand chose d’elle ! Certes c’est vrai, mais quand même on sait qu’elle est morte ! Je l’ai donc rajoutée.

Mais il se produit à un moment donné un chassé croisé :

 

 4 – Ce qui se substitue à la triangulation dans laquelle la mère serait un objet aimé, c’est un trio avec Madame K. :

Son père, Madame K et Dora.

 

5 – Prenons aussi Dora et Monsieur K. devenant un couple parental vis à vis des deux enfants K. ( Dora remplace leur mère )

 

5- Encore une autre possible mais ou là c’est Monsieur K qui n’est pas objet aimé: Nous avons Monsieur K, Madame K. et Dora.

 

6 – Mais comme dans toute comédie dramatique, il y a certes des personnages principaux de premier plan, et des personnages que l’on peut croire secondaires mais qui peuvent pourtant jouer le rôle d’un grain de sable capable d’enrayer toute la machinerie.

 

Je pose cette hypothèse, et si la gouvernante des K qui avait reçu les faveurs de son maître Monsieur K. au point qu’elle craignait fort d’être enceinte de ses œuvres, avait été la vraie cause de la gifle administrée par Dora à Monsieur K. ? (p. 79) mais là j’anticipe.

 

La vraie triangulation de Dora, dans ce cas aurait été celle-ci,

 

Monsieur K. et la vraie rivale de Dora, la jeune gouvernante, objet des faveurs de Monsieur K. et Dora. Elle n’apparaît qu’à la fin du film si je me souviens bien.

Ainsi s’expliquerait, mais d’une autre façon, cette phrase de Dora :  » Il m’a traité comme une gouvernante !  »

 

Mais n’oublions pas Freud, parmi tous ces personnages. A vrai dire, dans cette histoire, il y perd quelque peu son latin, mais comment pourrait-on lui en vouloir?

 

Et surtout celui que Freud appelle d’un terme un peu désuet  » son adorateur parti à l’étranger.

 

 

Donc résumons par ordre d’entrée en scène

 

– Le père de Dora et son amie très chère, Madame K.

– La mère de Dora, laissée pour compte mais qui reçoit quand même quelques bijoux à l’occasion. Les conventions bourgeoises sont respectées.

– Dora, son frère, les enfants de Monsieur et Madame K, une cousine de Dora.

– Deux gouvernantes, l’une chez les parents de Dora, l’autre chez les K.

La première ouvre la piste de l’intérêt de Dora pour Madame K.

La seconde celle de la jalousie et de la rancune de Dora envers Monsieur K. Là aussi bien Freud que Lacan n’y voient que du bleu. (Préjugés de classe ? )

– L’adorateur parti à l’étranger, futur époux de Dora.

– Et Freud dans tout ça ?

 

On pourrait en faire un film un peu actualisé. En attendant c’était Dora, qui comme on dit, faisait son cinéma.

 

 

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