Animal totem et animal phobique

 

Dans ce chapitre de conclusion qui a pour titre «  Résumés et problèmes » (L’homme aux loups dans les cinq psychanalyses, page 26O du gardiner),  après avoir à nouveau évoqué la genèse de la phobie du papillon, Freud nous incite à avoir le courage d’avoir à affronter les conditions encore plus compliquées de la névrose obsessionnelle.

 

Il repart de ce qu’il avait décrit par rapport à la structure de la phobie et se demande quels sont les facteurs qui ont transformé cet état en névrose obsessionnelle. Il en aborde deux, le premier il l’a déjà développé dans les chapitres qui précédent, il s’agit de son apprentissage de l’histoire sainte. Le second facteur il ne l’a pas encore abordé si ce n’est quand même dans son autre ouvrage, celui de Totem et tabou. Il se sert donc pour expliquer la transformation de la phobie en névrose obsessionnelle de l’existence d’un animal totem qui accompagne toujours un personnage de dieu ou de saint et qui peut toujours se substituer à lui. Cela fait penser au dieu indien Ganesch, le dieu éléphant,  qui, lui, est à la fois un dieu et un animal.

C’est donc important de retrouver d’une part ce que Freud en décrit dans ce passage mais également dans Totem et tabou. Mais ce sera aussi intéressant de retrouver dans le séminaire de Lacan interrompu, celui sur les Noms du père, ce qu’il avait évoqué du sacrifice d’Abraham qui avait été exigé de Dieu. Au moment où il s’apprêtait à sacrifier son fils, à l’égorger, c’est un bouc qui surgi dans les buissons pour être sacrifié à sa place, ce bouc est l’ancêtre de sa race. C’est donc lui, cet l’animal-totem qui est sacrifié à la place du fils.

Au moment où sa phobie est transformée en névrose obsessionnelle sous l’influence de son apprentissage de l’histoire sainte, écrit Freud, « son succès visible est que la relation au père située au premier plan, relation qui jusque là s’était exprimée par la phobie du loup, s’extériorise maintenant sous forme de piété compulsive ». Il baisait tous les soirs, avant de se coucher, les icônes qui décoraient les murs de sa chambre.

Et c’est de là qu’il part pour préciser quels sont « les rapports de l’animal avec la divinité » en se référant à Totem et tabou : «  J’y soutenais l’idée que la représentation de Dieu n’est pas une continuation du totem, mais procède indépendamment de lui, de la racine commune aux deux pour prendre sa relève. Le totem, disais-je, est le premier substitut du père, le dieu un substitut ultérieur, dans lequel le père recouvre la figure humaine. C’est ce que nous trouvons aussi chez notre patient. Il parcourt dans la phobie du loup le stade du substitut totémique du père, qui s’interrompt ensuite et se trouve remplacé, à la suite de nouvelles relations entre lui et le père, par une phase de piété religieuse. »

 

Dans son ouvrage Totem et tabou, Freud consacre tout un chapitre au Totem or sa fonction est celle d’établir les systèmes de relations de parentés et donc les règles de l’exogamie. Il pose donc les interdits par rapport à l’Œdipe. C’est sans doute en cela qu’on peut dire qu’il est un substitut du père. C’est aussi peut-être en cela qu’on peut déjà entrevoir comment ce que Lacan appelle « le cristal signifiant de la phobie » est une métaphore symptomatique qui vient suppléer la métaphore paternelle, qui y apporte si on peut dire remède. C’est elle qui pose un interdit par rapport au désir de la mère. Nous verrons cela de plus près dans le fil de lecture du Petit Hans, mais en attendant le texte de Totem et tabou sur les animaux totems mérite un détour ainsi que le séminaire de Lacan sur les noms du père même si nous n’en avons que quelques notes reconstituées.

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