A propos des effets de la guerre sur les belligérants

J’ai trouvé dans l’une des lettres de Freud adressée à Jones une remarquable description métapsychologique des mécanismes déclencheurs d’une névrose de guerre. Il écrit cette lettre peu de temps après la fin de la guerre de 1914 puisqu’elle est datée du 17 octobre 1918. Il écrit : « … je suis généralement, en ce moment dépourvu d’idées, néanmoins quelques unes me viennent à l’esprit le matin au réveil. Je mets à votre disposition la dernière de celles-ci, relative aux névroses traumatiques de guerre.

Il s’agit d’un conflit entre deux idéaux du moi, l’idéal habituel et celui que la guerre a suscité chez le sujet. Le dernier idéal se rapporte aux relations avec de nouveaux objets ( officiers et camarades) et équivaut ainsi à un investissement objectal. Nous pourrions parler d’un choix objectal en disharmonie avec le moi ( en note : en disharmonie avec le moi antérieur). Donc le conflit peut se produire tout à fait comme dans les psychonévroses ordinaires. En terme de théorie, un nouveau moi s’est développé sur la base d’un investissement libidinal d’objet et le moi ancien tend à l’en déloger. Il y a ainsi lutte à l’intérieur du moi et non entre le moi et la libido, ce qui au fond revient au même ».
Et à cette analyse, il rajoute cette remarque frappante concernant une similitude entre ces névroses de guerre et la mélancolie : « Un certain parallélisme existe entre la mélancolie où un moi nouveau s’est établi – mais non un idéal – tout simplement un nouveau moi sur la base d’un investissement objectal abandonné ».
Donc si j’ai bien saisi ces différences dans les névroses de guerre, il y a la fois conflit entre deux idéaux du moi et deux moi – les nouveaux et les anciens. Dans la mélancolie, c’est un conflit entre les deux moi.
Pour se repérer dans cette métapsychologie, le petit schéma de Freud qui se trouve dans son chapitre « Etat amoureux et hypnose » peut se révéler précieux.

A propos de cette substitution à l’idéal du moi du sujet remplacé par un autre imposé par une armée en guerre, un idéal guerrier, on ne peut que penser aux dégâts psychiques que peut provoquer le franchissement de cet interdit imposé par la civilisation, celui du « Tu ne tueras point ». Il ne peut en effet qu’entrer en conflit avec le nouvel idéal du moi imposé au sujet, le mot d’ordre devenant « Tu tueras » et même « Tu violeras ». L’un n’allant pas sans l’autre. C’est ainsi qu’indépendamment de son ennemi, on massacre au moins psychiquement si ce n’est physiquement toute la propre jeunesse d’un pays. A bon entendeur, salut !
J’ai vu, par exemple,  il y a quelques temps, sur internet, la vidéo de soldats  passant à tabac un homme désarmé et le bourrer de coups de pieds et de coups de poings alors qu’il était à terre sans défense ! Ils étaient au moins un bonne dizaine à s’acharner sur lui.

Nul doute que ces névroses de guerre se répartissent justement entre tous les belligérants, mieux vaudrait donc en tenir compte. Ce sont toujours elles qui finissent par gagner et haut la main !

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