Les cinq psychanalyses

Du désir insatisfait de l’hystérique au désir impossible de l’obsessionnel

 Liliane Fainsilber

 Dans cette séance du 14 mai 1958 Lacan commence une approche de la structure de la névrose obsessionnelle en prenant appui sur les trois textes de Maurice Bouvet qui méritent tous trois une lecture approfondie.

Ce sont respectivement, « Le moi dans la névrose obsessionnelle », « Importance de l’aspect homosexuel du transfert dans le traitement de quatre cas de névrose obsessionnelle masculine », « Les incidences thérapeutiques de la prise de conscience de l’envie du pénis dans la névrose obsessionnelle féminine ».

« La névrose a pour issue la destruction du complexe d’Œdipe »

Je livre à votre méditation ce passage d’inhibition, symptôme et angoisse, à la fin du chapitre VI :  « Etudier la formation de symptôme, dans d’autres affections que les phobies, l’hystérie de conversion et la névrose obsessionnelle, serait infructueux, car nous en savons trop peu à leur sujet. Mais l’examen critique et comparé de ces trois névroses fait apparaître un problème d’importance et qui ne saurait plus être ajourné. Chacune de ces trois névroses a pour issue la destruction du complexe d’Œdipe et nous admettons que dans toutes les trois l’angoisse de castration est ce qui conduit le moi à se dresser contre le processus pulsionnel du (moi) ». Ici, c’est un lapsus sans doute du traducteur. Bien sûr il faut lire « le processus pulsionnel du ça ».

Donc, premier point, nous sommes en 1925 et pourtant Freud déclare en quelque sorte forfait quant à son approche des deux autres structures, psychose et  perversion, alors qu’il a pourtant déjà écrit son texte sur le Président Schreber mais n’a pas trouvé le mécanisme spécifique qui détermine le phénomène psychotique.

 Mais le second point important est celui de la « destruction » du complexe d’Œdipe comme issue de la névrose.

les origines pulsionnelles de nos plus hautes performances intellectuelles

L’isolation, un des mécanismes de fabrication du symptôme

Après l’annulation rétroactive, dans ce chapitre VI d’inhibition, symptôme et Angoisse,  Freud décrit ce qu’il appelle le mécanisme de l’isolation. Il rattache ce mécanisme d’une part à la concentration intellectuelle, d’autre part au tabou du toucher. Comme pour le premier mécanisme décrit, celui de l’annulation rétrospective, Freud décrit d’une part ce qui relève de la structure de la névrose et d’autre part de la « normalité ».

L’annulation rétroactive et la compulsion de répétition

Dans ma version d’inhibition, symptôme et angoisse, celle du PUF, couverture marron, la page 42  est à la fois magistrale et terriblement difficile, ce qui est surprenant dans ce passage c’est qu’il rapproche l’un des mécanismes typiques des modes de refoulement de la névrose obsessionnelle, ce qu’il appelle « annulation rétroactive » de la « compulsion de répétition ».

« Il n’y a d’analyse que du particulier »

On éprouve le besoin d’aérer un peu ce texte d’Inhibition, symptôme et angoisse, en repartant en effet d’exemples cliniques, car il relève d’une sorte de mathématisation de la théorie freudienne. C’est ce que Freud lui-même a fait en reprenant, pour les comparer l’analyse de la phobie de l’Homme aux loups et celle du Petit Hans

Une savante métapsychologie de la phobie du Petit Hans (1)

Donc dans ce chapitre IV d’Inhibition, symptôme et angoisse, Freud évoque, au titre d’exemple clinique des liens du moi avec le symptôme, les deux phobies du Petit Hans et de l’Homme aux loups. La première phrase mérite d’emblée notre attention «  Commençons par considérer le cas d’une phobie infantile hystérique d’animaux, par exemple le cas du « Petit Hans » ».  La phobie est donc bien rangée dans l’hystérie, alors que nous avions déjà repéré, avec l’Homme aux loups, qu’il y avait toujours un soubassement hystérique à la névrose obsessionnelle. C’est ce qui apporte la preuve de l’existence d’une névrose en gigogne, la phobie en constituant le noyau sur lequel s’édifie l’hystérie puis la névrose obsessionnelle. 

Les hommes hystériques, ces ambassadeurs oubliés du pays de l’Inconscient

A une lecture attentive du texte de Freud, on découvre que l’hystérie masculine, qui a pourtant joué un rôle décisif dans l’invention de la psychanalyse est le plus souvent élidée, oubliée, au profit de l’hystérie féminine, mais qu’elle ressurgit quand même, toujours à point nommé, à tous les temps d’émergence et de franchissement de la théorie analytique. Elle est toujours associée à ses grands moments de fécondité.

Mais pour pouvoir donner du poids à cette hypothèse de travail, je voudrais dégager, à partir du texte freudien et en le suivant de près, cinq axiomes, cinq théorèmes qui fondent la logique du symptôme hystérique et qui ont permis à Freud d’inventer ce champ de la psychanalyse. C’est ce que je vais essayer de développer pour vous, sous ce titre : Les hommes hystériques, ces ambassadeurs oubliés du pays de l‘inconscient.

Donc les symptômes de toutes ces belles dames de la société viennoise, celles qui tombaient en pâmoison dans les bras de leur médecin, ont réussi à faire oublier qu’il existait une véritable internationale de l’hystérie masculine. Car ces hommes hystériques, eux, ne sont pas de la Haute. Ce sont surtout des prolétaires, ouvriers du bâtiment, chauffeurs de locomotive ou conducteurs de tramway.

Ces hommes hystériques, ces ouvriers de la grande œuvre freudienne, sont là, dès 1886, au moment où Freud revient de Paris avec son précieux butin, tout ce qu’il appris de Charcot, avec ses souvenirs de La Salpétrière.

La formation du symptôme comme substitut de cette motion pulsionnelle refoulée par le moi

Jusqu’à la page 11 d’inhibition, symptôme et angoisse, dans ce chapitre II, il était question de la façon dont le moi exerçait son pouvoir sur les motions pulsionnelles venues du ça pour les refouler, quand elles faisaient obstacle au principe de plaisir (le moins de vagues possible) pour cela il lui suffisait d’envoyer un simple petit signal de déplaisir sous forme de l’angoisse.

Inhibition, symptôme, angoisse noués avec le noeud borroméen

 Pour ceux que ces questions intéressent :  Au cours de la première séance du séminaire RSI, Lacan annonce ce qu’il compte développer dans le fils de son enseignement et il y inclut le nouage de ces trois concepts freudiens Inhibition, Symptôme, Angoisse.

« Un point que je suggère est d’ores et déjà celui-ci, pour revenir à Freud, c’est à savoir ce quelque chose de triadique, il l’a énoncé Inhibition, Symptôme, Angoisse.

Textes à propos des cinq psychanalyses de Freud

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