Lacan va donc expliciter, dans ce texte consacré à l’Homme aux rats, le mythe individuel du névrosé, en quoi l’Œdipe est le mythe au cœur de l’expérience analytique mais un mythe qu’il faut en quelque sorte compléter, complexifier, et même réactualiser. Mais il commence par se lancer dans une sorte de justification de ce choix. : pourquoi faudrait–il revenir sur l’étude de ces cinq psychanalyses ? Les critiques ne manquent pas à ce propos et même encore de nos jours
« la belle gorge » de la poésie et le corset de la structure
Je voulais écrire quelque chose sur la poésie de Mallarmé, et en lisant quelques uns de ses textes, j’ai trouvé ce passage amusant : C’est un petit paragraphe à propos d’une question qu’on pose à Mallarmé : « Connaissez-vous les psychologues ? – Un peu. Il me semble qu’après les grandes oeuvres de Flaubert, des Goncourt et de Zola, qui sont des sortes de poèmes, on est revenu aujourd’hui au vieux goût français du siècle dernier, beaucoup plus humble et modeste qui consiste non à prendre à la peinture ses moyens pour montrer la forme extérieure des choses, mais à disséquer les motifs de l’âme humaine. Mais il y a entre cela et la poésie, la même différence qu’il y a entre un corset et une belle gorge… » L’évocation de la métapsychologie, de la « fée métapsychologie », comme corset semble un peu rude et dépourvue en effet de poésie, par…
Le rêve de celle qui était allée trop tard au marché
Freud a cette jolie formule « le rêve ne s’intéresse jamais à des broutilles ». Pour démontrer comment malgré ce que peut laisser penser son contenu manifeste, un rêve n’est jamais anodin, il raconte le tout premier rêve de l’une de ses analysantes.
Freud relate deux versions de son contenu manifeste : « j’ai rêvé que j’arrivais trop tard au marché et ne trouvais plus rien chez le boucher ni chez la marchande de légumes. Rêve anodin assurément, mais un rêve ressemble à autre chose ; je me le fais raconter de manière détaillée […] Elle va au marché avec sa cuisinière. Celle-ci porte le panier. Le boucher, après qu’elle lui a demandé quelque chose, dit ça on n’en a plus et veut lui donner autre chose avec le commentaire suivant : ça aussi c’est bon. Elle refuse et va trouver la marchande de légumes, laquelle veut lui vendre un drôle de légume ficelé en plusieurs bottes, mais noir de couleur. Elle dit « je ne connais pas, je ne prends pas ça ».
La fonction de l’Œdipe et du Père dans la « génitalisation »
Dans la séance du 15 janvier 1958 du séminaire Les Formations de l’inconscient, Lacan évoque la fonction de l’Œdipe et du père dans la « génitalisation » ou l’assomption de son propre sexe Nous pouvons déjà repérer dans ces séances consacrées à la métaphore paternelle que Lacan explore toutes les questions que soulève l’Œdipe, celle bien sûr de la névrose, avec au coeur de celle-ci, les difficultés théoriques que pose l’Œdipe dit inversé, celui où le sujet, le garçon, souhaite être aimé de son père comme une femme, dans une position féminine passive. Il évoque aussi la question des perturbations qui se produisent dans le champ de la réalité perturbations qui sont communes, quoique de façon différente, à la perversion et à la psychose. Parmi ce foisonnement de questions surgit aussi celle de ce qu’il appelle la « génitalisation ».Il semble que, de nos jours, ce terme ne soit plus beaucoup utilisé. A vrai…
Quand Lacan réinterprète le rêve de Freud, celui de la monographie botanique
Dans la séance du séminaire des Ecrits techniques de Freud, du 30 juin 1954, Lacan interprète allègrement et je pourrais même dire sauvagement le rêve de la monographie botanique que nous avons travaillé ces temps-ci. Par ailleurs tous les termes allemands correspondant au déplacement, à la condensation, défiguration, qui président à l’élaboration du rêve y sont de plus décrits. Mais je les reprends à partir du texte de Freud.
Ce qu’est das Ding
Avez-vous déjà repéré cette belle présentation de ce qu’est « das Ding » dans le séminaire de l’Éthique de la psychanalyse, sous la forme de cet « étranger » au cœur de l’inconscient? « Faisons entrer le simple d’esprit, faisons le asseoir au premier rang et demandons lui ce que veut dire Lacan. Le simple d’esprit se lève, vient au tableau et explique. Lacan depuis le début de l’année nous parle de das Ding dans les termes suivants. Il le met, si je puis dire, au cœur d’un monde subjectif qui est celui dont il nous dépeint l’économie, selon Freud, depuis des années, ce monde subjectif se définissant en ceci que le signifiant est chez l’homme, déjà intronisé au niveau inconscient, mêlant ses repères aux possibilités d’orientation que lui donne son fonctionnement d’organisme vivant. Déjà de l’inscrire ainsi, sur ce tableau, mettant das Ding au centre et autour ce monde…
Qu’est-ce que l’objet petit a ?
Christelle, j’essaie de te répondre au sujet de l’objet a. Lacan indique que c’est lui qui l’a inventé. Il l’a en effet nommé ainsi. Mais c’est quand même à partir de l’objet perdu et retrouvé de Freud. Pour répondre à ta question, je pense qu’il faut tenir compte tout d’abord du fait qu’il participe des trois registres, Réel, Imaginaire et Symbolique, comme en témoigne d’ailleurs sa présence au cœur du nœud borroméen, participant donc à ses trois ronds.
Pris dans le registre du Réel, c’est l’objet perdu de la théorie freudienne mais il participe aussi au concept de Das Ding en tant que c’est l’Autre préhistorique que l’enfant appelle de ses cris.
C’est l’objet dit partiel, car à chaque pulsion correspond un objet partiel, nous retrouvons donc – l’objet oral, le sein – l’objet anal, les selles, mais aussi toute la série, merde, argent, cadeau, enfant, pénis – l’objet voix -et le regard. Ce sont tous des objets dits caduques, ils sont, si on peut dire tous chapeautés par le signifiant de cette perte, le phallus.
La cueillette des signifiants dans le rêve de la monographie botanique
Après le rêve de l’injection faite à Irma, nous lisons maintenant le rêve de la monographie botanique. Le texte du rêve est très court, par contre les associations du rêve sont, elles, très nombreuses. Les fleurs y sont mises à l’honneur, le cyclamen, fleur préférée de Martha et la fleur d’artichaut, fleur préférée de Sigmund. » J’ai écrit une monographie sur une certaine plante. j’ai le livre sous les yeux, je suis entrain de tourner une planche en couleur repliée à l’intérieur. A chaque exemplaire est annexé un spécimen séché de la plante, comme on en trouverait dans un herbarium ».
Ce rêve se trouve dans le chapitre Matériau et sources du rêve et dans le sous-chapitre intitulé « le récent et l’indifférent dans le rêve ». Sous ce titre, Freud y décrira l’un des mécanismes du rêve, celui qu’il appelle « déplacement » et que Lacan rapprochera de la métonymie. Ce qu’il convient de préciser c’est le fait que Freud décrit là une sorte de déplacement très particulier, très spécifié, c’est un déplacement vers le récent mais aussi et surtout vers l’indifférent.
Une approche inattendue de la question de la jouissance féminine
Dans le séminaire de 9 janvier, de La relation d’objet, Lacan évoque ce qu’est « l’objet féminin » et il précise d’emblée le problème qui est celui de savoir ce que cet objet en pense : » Ce que l’objet féminin en pense c’est encore moins naturel que la façon dont le sujet masculin l’aborde. Ce que l’objet féminin en pense, à savoir quel est son chemin depuis ses premières approches de l’objet naturel et primordial du désir, à savoir le sein maternel. Comment l’objet féminin entre dans cette dialectique ? »
Lacan précise que si cette position est si inconfortable et » fort peu naturelle » c’est justement parce que cette position est prise par un sujet.
Sur ce chemin plein d’embûches, Lacan précise que » l’homosexualité féminine se rencontre chaque fois que la discussion s’établit sur le sujet des étapes que la femme a à remplir dans son achèvement symbolique. »
C’est la raison pour laquelle, en relisant ce cas rapporté par Freud, celui de la jeune homosexuelle, on peut constater à quel point elle montre le chemin à Dora, le chemin de sa féminité. Elle la devance en effet. Mais comme sa démarche est tout aussi inconsciente que celle de Dora, elle ne peut pas, pas plus qu’elle, se tirer d’affaire. Elle ignore en effet la vérité et la justesse de ce qu’elle met en scène, ce que peut être l’amour d’un homme pour une femme, une femme assumant sa privation phallique.
Mais pour mettre en évidence cette démonstration si brillante de ce que devrait être l’objet féminin pour un homme, je vous propose un détour, de retrouver ce que Lacan, relisant Freud, dit des deux choix d’objet d’amour.
Exercice de style autour du Réel, symbolique et imaginaire noués par le symptôme
Lacan a introduit très tôt dans son enseignement ces trois catégories du Symbolique, de l’Imaginaire et du Réel comme étant trois catégories qui permettent de structurer ce qu’il en est de l’expérience analytique, de pouvoir s’y repérer de façon rigoureuse et surtout d’assurer ce qui est la fonction décisive du psychanalyste, l’interprétation.
Ce R.S.I en raccourci, est une gageure que nous avait proposée une participante à une liste de discussion consacrée à la psychanalyse : Peut-on dire, juste en quelques mots ce que sont ces trois catégories du Réel, du Symbolique et de l’imaginaire et comment ils sont noués par le symptôme ?
J’ai essayé de le démontrer à l’aide de trois exemples, trois traits d’esprit, ceux que Lacan a empruntés à Freud, et qu’il commente dans le séminaire des Formations de l’inconscient.