Psychanalyse

Le rêve du miroir incendiaire d’Archimède

Ce rêve, tout comme le rêve de « Rabbi Savonarole », est lui aussi mis tout d’abord en relation avec la périodicité de Fliess, celle des périodes de 28 et de 23 jours qui sont mises en lien respectivement avec la féminité ou la virilité. Cette périodicité Freud la réfute cependant à chaque fois, pour évoquer un événement de la veille qui a provoqué son rêve, en l’occurrence, cette fois-ci, le fait qu’il avait appris une mauvaise nouvelle, la suppression du lieu où il pouvait jusqu’alors donner ses conférences. Cela lui avait sans doute fait penser, écrit-il, à ses débuts de jeune médecin où on lui avait  refusé toute aide d’où son appel à Archimède et à ses « miroirs incendiaires ». Lui saurait au moins lui trouver un lieu où parler de psychanalyse.

Le rêve de « Rabbi Savonarole »

J’ai commencé à lire le chapitre qui suit « la défiguration du rêve ». Il a pour titre « Matériel et source du rêve ». Avant de nous lancer dans la lecture du grand rêve de la monographie botanique, il y a trois petits rêves que Freud rapporte dans les notes de la page 206 et 207 sur lesquels nous pouvons nous arrêter même si, à une première lecture, j’ai l’impression que nous ne pourrons pas en tirer grand chose, tout au moins pour le premier, car il n’est pas interprété.  Pour moi, ce qu’ils m’ont surtout surtout évoqués ce sont ces fameuses « périodes » de 28 et de 23 jours qui soutiennent la thèse de la bisexualité humaine de Fliess. Par ces deux rêves, on constate que Freud commence à la critiquer, qu’il n’y croit plus trop. En fait on s’aperçoit que dans ce contexte il n’utilise ces trois rêves que pour démontrer que…

Une belle interprétation de deux rêves par August Stärcke

Claire Charlot

Dans L’interprétation des rêves, dans un petit paragraphe d’une douzaine de lignes situé vers la fin du chapitre sur la « déformation onirique », Freud nous présente un rêve de façon particulièrement elliptique, un rêve fait et analysé par August Stärcke. Il s’agit d’un rêve dont le caractère hautement non-désiré du contenu représenté est évident : « j’ai et je vois sur mon index gauche une affection syphilitique primaire de la dernière phalange ». Derrière cette horrible vision, l’analyse, nous dit Freud, a pourtant révélé la satisfaction de désirs fortement chargés d’affect en rapprochant le terme d’« affection primaire » du latin prima affectio qui signifie « premier amour ».

Un rêve qui semblait mettre en œuvre le contraire de la réalisation d’un souhait, et en même temps un exemple de rêve interprété par un autre rêve1.

Par August Stärcke, Willem Arntshoeve2 (Hollande).

Traduit par Claire Charlot [Crochets et notes de la traductrice]

Weygandt a soulevé contre Freud l’objection que beaucoup de rêves représentent directement le non-désiré. Bien que ce reproche ne puisse être fait que si la différence entre le contenu du rêve latent et manifeste est négligée, et a été réfuté par Freud lui-même dans la première édition de l’Interprétation des rêves au moyen d’exemples intéressants, étant donné les concepts merveilleusement tordus que certains experts chérissent encore sur ce chapitre, il peut être utile de communiquer un tel rêve dans lequel cette différence s’exprime nettement.

Un médecin rêve :

« J’ai et je vois sur mon index gauche une affection syphilitique primaire de la dernière phalange. »

Ce serait vraiment la dernière chose que l’on puisse souhaiter ! Le rêveur n’a jamais eu de syphilis. Une infection vénérienne serait aussi la chose la plus terrible qui pourrait lui arriver.

Rêve de l’affection syphilitique

Pour terminer son paragraphe sur ce qu’il appelle les « anti-rêves de désir », Freud a emprunté à Auguste Stärke, un tout petit rêve qui a la grand mérite de livrer presque à nu les signifiants qui en constituent la trame. Freud s’est contenté de reprendre,  dans l’article de Stärke, les deux bouts de la chaîne des associations du rêveur, tout d’abord le texte du rêve puis  son interprétation.

Voici son contenu manifeste : «  J’ai et je vois sur mon index gauche une affection syphilitique de la dernière phalange »

Et son interprétation : « … on découvrira qu’affection primaire doit être mis en équation avec « prima affectio » (premier amour) et que le bubon repoussant, selon les mots même de Stärke « se révèle être le représentant de désirs fortement chargés sur le plan affectif ».

Le rêve de celle qui souhaitait que Freud ait tort pour que son frère puisse avoir raison

Au point d’acmé de la résistance

En reprenant la lecture de chacun des rêves de la fin de ce chapitre « La défiguration du rêve », J’ai été tout d’un coup frappée par l’importance en effet que Freud accorde à l’intensité de la résistance que ses énonciations mobilisent à chaque fois, résistance qui se manifeste par le désir que Freud ait tort quant à sa thèse que le rêve est la réalisation déguisée d’un désir refoulé.

Un jeune médecin rêve qu’il a des problèmes avec le fisc et va payer «une amende salée »

Il s’agit,en ce début du mois de septembre de poursuivre le travail commencé et de lire, ligne à ligne et un par un, chacun des rêves de l’Interprétation du rêve dans la nouvelle traduction qui me semble plus littérale, plus exigeante de Jean-Pierre Lefebvre. C’est passionnant d’y retrouver tout ce qu’on peut découvrir de l’œuvre freudienne.   Pour l’instant nous en sommes au grand chapitre « la défiguration du  rêve », à la page 197. Il est important d’articuler ce rêve d’infanticide que nous avons déjà travaillé au suivant puisque le rêve de ce jeune médecin qui a des problèmes avec le fisc en reprend la même structure, ce que Freud appelle le « même mode de pensée ».

Notes sur ce Rêve d’infanticide

Le rêve qui suit fait encore partie de la série des rêves qui paraissent démentir l’affirmation de Freud que le rêve est une réalisation de désir. Ils sont tous cités dans le chapitre « La déformation du rêve » ou « La défiguration onirique ».

Voici le texte de ce rêve  qui n’est pas celui d’un analysant mais d’une connaissance de Freud, un juriste : « Je rêve, rapporte mon informateur que j’arrive devant chez moi, une dame à mon bras. Là attend une voiture fermée, un monsieur s’avance vers moi, excipe de sa qualité d’agent de police et m’enjoint de le suivre. Je le prie seulement de me laisser le temps de régler mes affaires ».1

Un rêve où l’analysante voit sa fille de quinze ans, morte, dans une boite

A la suite de ce rêve dit d’impatience, celui de voir l’homme que cette femme aimait au cours de l’enterrement de l’enfant de sa soeur, Freud ne nous raconte, cette fois-ci qu’un petit fragment de rêve de l’une de ses analysantes où il s’agit à nouveau de la mort d’en enfant.

En voici le texte :

«  Cette dame avait l’impression, dans le contexte d’un rêve assez long, qu’elle voyait sa fille unique de quinze ans, morte, couchée là devant elle, dans une boite ».

Il s’agit bien là d’une image, « une image onirique ». Freud la décrit même comme une sorte d’apparition. Elle rend bien compte de ce pourquoi il qualifie le rêve de rébus. C’est une image qu’il convient de déchiffrer, de mettre en mots. Il s’agit d’en faire le récit.

Et ce qui va justement aider au déchiffrage de ce rêve, c’est le signifiant « boite ».

Le rêve d’impatience d’une femme amoureuse

Le rêve que Freud raconte maintenant est celui d’une jeune femme qui a été élevée par sa sœur aînée. Il fait partie de toute la série de ces rêves que Freud décrit comme faisant objection au rêve comme réalisation de désir .

Quand on prend le texte même du rêve, en l’isolant de son contexte, on découvre à quel point il est impossible de l’analyser sans l’aide de la rêveuse, non seulement de ses associations mais aussi de son histoire. Il est en effet, tel quel, littéralement indéchiffrable :

« Cette nuit je rêve que je vois le jeune Cary, couché mort devant moi. Il est allongé dans un petit cercueil, mains jointes, il y a des cierges tout autour. Bref exactement la même chose que jadis avec le petit Otto, dont la mort m’a tellement bouleversée »1.

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